Leur beauté est liée à leur uniformité, c’est-à-dire à l’unité de leur forme, qui est de nature formelle ou idéale. Platon récuse ce que nous appellerions, moyennant une dérive sémantique imposée à un terme grec, une conception purement esthétique de la beauté. Cette valeur ajoutée qu'apporte l'art poïétique à la matière façonnée en signale, nous dit Heidegger, l’« être authentique ». D’un autre côté, on peut accorder à Plotin que la notion stoïcienne de proportion ne s’applique qu’aux corps composés, et non pas à leurs parties considérées isolément, alors que, comme ils le reconnaissent implicitement, il y a aussi une beauté de ces parties, que Plotin appelle, par opposition à celle des touts composés, une beauté « simple (haplous) » : on parle bien du beau son d’un violon, qu’on peut l’apprécier sur une seule note, et qui rend la musique plus belle que si elle est jouée avec des instruments grinçants. Le sujet de la question désigne ce que nous appelons, Cette connaissance de la règle est ce qui donne à la, Tous ces éléments de l’analyse platonicienne se retrouvent dans la définition aristotélicienne de la, Platon retourne contre l’artiste la conception traditionnelle qui le présente comme un, Platon reprend ici en un sens critique une idée déjà formulée dans l’, La poésie apparaît ainsi comme une production irrationnelle, rapportée à une cause elle-même irrationnelle, passablement mythique. (...) Le paraître disposé dans l'œuvre est le beau »[34], ajoute Heidegger. Il sera incapable d’interpréter la technique illusionniste de Véronèse. » dit Vlaminck. On voit que Plotin retourne contre les condamnations platoniciennes de certaines formes d’art la conception que Platon lui-même avait de la réalité des choses sensibles naturelles en tant qu’œuvres d’une démiurgie divine produites à l’image des idées. La mimèsis est en fait pour Aristote ce qui distingue la poésie du simple usage des artifices poétiques, telle la versification. On pourrait penser que cette hiérarchisation des productions n’entraîne pas d’elle-même la dévaluation de l’art : celui-ci est dit avoir un certain rapport, indirect, à la vérité, par l’intermédiaire du produit artificiel qu’il imite. L’intervention du sculpteur imprime un principe de détermination qui amène l'altérité potentielle de l'airain à l'être en acte de la statue. Dire que la beauté résulte de l’infusion de la forme dans la matière, c’est dire que la beauté du corps provient d’une beauté « antérieure (pro) » à elle, à savoir la beauté qui doit être inhérente à l’idée elle-même si celle-ci est ce qui confère sa beauté au corps. Mais l’intérêt de ce jugement est précisément que Platon parlait en connaissance de cause, non seulement en tant que contemporain de l’art qu’il critique, mais en tant que praticien lui-même de certains arts : il avait assimilé toute la culture littéraire de son temps, mais aussi appris la musique et la danset, et, selon Diogène Laërce, « il s’initia à la peinture, écrivit des poèmes, d’abord des dithyrambes, puis des vers lyriques et des tragédies » (, Une anecdote citée par Nietzsche raconte qu’il brûla ces dernières après sa rencontre avec Socrate (, La fonction communément attribuée aux poètes était d’, Cette question paradoxale peut résumer l’interrogation de Platon sur les arts. Ce dernier est appelé par Diotime « le beau divin lui-même » (211e), et pour les mortels, le but ultime est de « pouvoir (le) contempler (katideïn) dans son unité essentielle (monoeïdés) ». Les forces en jeu dans l'art sont essentiellement les forces actives : elles n'ont pas besoin de s'opposer ou de nier d'autres forces pour s'imposer. Mais ce sens ne se réduit pas à son utilité ou non. La beauté du Taj Mahal dont la reconnaissance immédiate s’impose intuitivement à nous, repose sur une stylisation de l’amour et de la mort. L’art reçoit ici une fonction que l’on peut appeler métaphysique. La quête de la beauté véritable est une démarche maïeutique qui implique une certaine ascèse, car, souvenons-nous, le mythe nous apprend que c’est de façon négative que l’on approche de la vérité. L’artiste ne peut pas savoir si, dans son imitation, l’objet est comme il faut, ou pas. Dans la République, ce rôle revenait au groupe fonctionnel capable de diriger la cité par la connaissance du Bien. ». « L'art est la mise en œuvre de la vérité. Celles-ci sont pour nous intempestives, et c’est pour cela qu’elles nous intéressent. De même, le poète tragique doit éviter la mise en scène de certaines situations impropres à susciter les passions tragiques (ch.13, 1452b-1453a 4 – Texte 11). Cette mise en problème est-elle même de type tout à fait platonicien : la question portant sur l’essence de la beauté (ti esti), est posée à partir de la reconnaissance de beautés multiples présentes dans divers ordres de réalités. C’est lorsqu’un tel principe n’est pas opérant que l’œuvre est composite. Si donc, il faut avoir le culte des belles actions, il faut renoncer à juger de leur beauté d’après l’enseignement des poètes. Toutefois, les Stoïciens étaient matérialistes, tandis que Plotin interprète leur langage en un sens idéaliste. C’est parce qu’il est une mimètikè ou une mimèsis que l’art peut avoir l’air d’une compétence universelle. [28] Aristote, «La Poétique», coll. Le récit est en effet la forme la plus objective – distanciée –, où l’illusion a le moins de part. b. Partie négative (pars destruens) : critique de la notion stoïcienne de summétria. Prolongements de l’esthétique platonicienne. Liste des citations de Platon classées par thématique. Lorsqu’il pense en vue de produire une connaissance scientifique, l’intellect analyse et démontre, c’est-à-dire distingue des concepts et enchaîne logiquement des propositions : ces opérations sont essentiellement discursives et mettent en œuvre des médiations. Elle contribue donc à l’éducation morale requise par la raison, et d’une manière appropriée. “Quel but se propose la peinture relativement à chaque objet. Platon comme Aristote conçoivent l’art à travers la grille de la mimésis. Le lumineux ainsi constitué dispose son paraître dans l'œuvre. D’où une nouvelle classification des productions : Dire que l’art est producteur d’images ne suffit dès lors pas à le dévaluer : Platon ici rapproche plutôt l’artiste de Dieu, et celui-ci est envisagé comme producteur non seulement de l’idée, mais de l’ensemble des êtres naturels et de leurs effets. L’école pythagoricienne développe les mathématiques comme science des rapports (logoï) entre quantités. Platon demande qu’on sache distinguer entre ce qui est beau et ce qui plaît au grand nombre. L'art n'est qu'une imitation, un miroir de ces ombres. Les limites ne peuvent être fixées exactement par une règle, car celle-ci risquerait d’être extérieure et inappropriée : elles doivent résulter de la nature de la chose représentée « selon la vraisemblance ou la nécessité » (1451a 6-15, p.40 – Texte 2). Ainsi un ornement ou une parure « convenables » « donnent aux choses l’apparence d’être plus belles qu’elles ne sont ». Si en effet la manière artistique de produire consiste à composer l’œuvre à partir non pas de l’unité de ses éléments, mais de l’unité de son idée, on peut y voir un analogue de ce que Plotin appelle la procession des êtres, c’est-à-dire la dérivation des choses multiples à partir de l’Un qui est leur principe : l’activité artistique donne à voir comment l’un peut produire le multiple et, ce faisant, se communiquer à lui. C’est pourquoi il est très difficile aux hommes de savoir maintenant ce que sont la justice et la sagesse : la réminiscence de ces réalités à travers leurs « images » – les exemples – n’est atteinte que par un petit nombre. Platon et l'art Une certaine tradition n’a retenu du platonisme qu’une condamnation des arts et de la poésie. La question est celle de l'ordre juste entre les différentes parties du tout. Mais la Poétique vise précisément à montrer que la mimèsis artistique relève d’une authentique technè, même sous les formes condamnées par le platonisme. Faisant allusion à une figure mythologique fameuse, Plotin dénonce un risque de narcissisme esthétique, qui consiste à en rester aux images sans remonter à leur principe. Cette interprétation de la mimésis renvoie à l'Allégorie de la Caverne[5] : ce que la plupart des hommes pensent être la « réalité véritable » n'est que l’ombre de celle-ci projetée sur les parois de la caverne. Il s’agit de comparer un bloc de marbre brut et une statue de marbre (le Zeus de Phidias ou le Moïse de Michel-Ange) : l’art du sculpteur a donné au marbre une beauté qu’il n’avait pas à l’origine. L'œuvre artistique nous amène à comprendre que ce qui caractérise un être ce n'est pas seulement sa réalité en acte, c'est aussi ce qu'il est susceptible de devenir. La tragédie opère donc un véritable, La formule qui résume la conception aristotélicienne de l’art ne se trouve pas dans la, La formule a été souvent critiquée. Les Stoïciens parlaient de, En outre, il trouve à sa propre thèse l’avantage qu’à la différence de la conception stoïcienne, elle s’applique aussi à la beauté des éléments simples ou isolés (I, 6, ch.2, 24-28, et ch.3, 17-19). Socrate entouré de beaux garçons et discutant avec eux sur l'art de conseiller, sur la sagesse ou sur l'amitié: situation mimant celle de l'éraste et de l'éromène, et conférant à plusieurs dialogues une atmosphère érotique. Plotin illustre cette antériorité, ou priorité ontologique plus encore que chronologique, en prenant l’exemple de l’architecte. L’art va ainsi au-delà des possibilités naturelles, mais dans la ligne de ces possibilités. Transcription par Taos Aït Si Slimane du cours du 04 décembre 2003. Il dénomme quiconque effectue une poïèsis, c’est-à-dire tous les producteurs, artistes on non. La première condition est nécessaire pour que tout un chacun puisse se mettre à la place du héros ; la deuxième pour que le malheur subi n’apparaisse pas comme une pure fatalité externe, comme telle simplement absurde. Aristote distingue ici des points de vue qui restaient confondus chez Platon, et il cesse de reprocher aux poètes leur incompétence dans les diverses sciences. La fulgurance de l’émotion esthétique que j’éprouve face au Taj Mahal n’a rien à voir avec le sentiment d’admiration que j’éprouve face à une prouesse technique, fut elle architecturale. Par extension, chose ou être qui permet à l'esprit ou au cœur de trouver son plein épanouissement. L’airain laissé à lui-même peut se corrompre. Elle renforce l’emprise de la doxa - l’opinion - sur la pensée. De ce point de vue, l'œuvre renvoie autant à son réfèrent qu'à l’idée qui l'engendre et en fait un objet nouveau à part entière. Aussi conviendrait-il d’appeler l’un poète, et l’autre, naturaliste plutôt que poète » (1447b 17 – Texte 13). L’art est producteur de connaissance[15]. Notamment, le propre de la tragédie est d’élever les hommes représentés au-dessus de ce qu’ils sont d’ordinaire, le propre de la comédie est de les rabaisser (16-18). Tout en faisant appel au mécanisme de l'image associée, la métaphore lui ôte à la fois son caractère de copie photographique et son caractère éventuellement arbitraire[22]. Ainsi l’art de produire trouve sa fin dans l’art de se servir et reçoit de lui sa norme : « nécessairement l’usager d’une chose est le plus expert, et il informe le fabricant des qualités et des défauts de son ouvrage par rapport à l’usage qu’il en fait ». On a ici un écho à la conversion personnelle de Platon, et de sa renonciation à la poésie tragique. Pour ne pas y tomber et s’y perdre, il faut passer de la contemplation des êtres ou des œuvres à la contemplation d’une beauté « plus vraie », parce que source de la leur. 2/ Impossible de reconnaître le rôle de l’idée dans la beauté sensible sans admettre une beauté non sensible de l’idée elle-même, et de l’art qui conçoit l’idée. 38-39, [13] Aristote, « La poétique », chap. Cette dernière contemplation ne sera plus esthétique au sens où elle ne sera plus d’ordre sensible : il s’agit d’appréhender ce que l’âme seule, et non plus les organes sensoriels, peut percevoir. [www.fabriquedesens.net/La-matiere-des-Grecs-a-Einstein,43]. Le principe est ici que « ni la gloire, ni la richesse, ni les dignités, ni même la poésie ne méritent que nous nous laissions porter à négliger la justice et les autres vertus » (République, X, 608b) : l’amour de la beauté ne saurait tourner au détriment de l’amour du bien. Dans l’Allégorie de la Caverne[1], la lumière de la beauté et de la vérité éclaire les choses réelles, et le rôle du philosophe est de contribuer à ce que nous nous détachions de l’apparence, des ombres de la doxa, pour apercevoir la réalité des choses. L’objet réalisé par l’artisan n’est ni une « croute » ni nécessairement une œuvre d’art. * Champs obligatoires. Selon la théorie saussurienne du rapport entre un signifiant et un signifié, le signifié symbole est en même temps le signifiant d'un autre signifié[21], la re-présentation d’une représentation, ou, en termes platoniciens, l’imitation d’une imitation. La beauté est l’effet de l’ordre dans un contenu d’une étendue limitée. Sa conception de la beauté poétique permet à Aristote de distinguer entre l’appréciation proprement esthétique d’une œuvre (le jugement de goût) et son appréciation d’un point de vue autre que celui de l’art poétique. Et celle-ci est le domaine de l'art. Sa critique vise en effet à montrer que la conception stoïcienne est moins fausse qu’insuffisante. D’un autre côté, il est rapide et facile de rejeter le platonisme du fait de sa proximité apparente avec un type d’idéologie apparu au XXème siècle. Racine et Corneille l’ont interprétée comme une action modératrice et rectificatrice. Il est beau intelligiblement ; l'admirer instinctivement sans en comprendre le rôle dans le tout intelligible, c'est s'installer dans l'imparfait, justifier l'imparfait même en tant que tel, parer du prestige éclatant de l'être un sous-univers qui n'est qu'une étape dans l'ascension vers Dieu. L’art est vu sous l’angle de l’acte créateur de vérité. Le mot poïètès ne sert pas seulement à désigner les poètes. Cette compréhension de la création artistique conduit Plotin à attribuer à l’artiste une « sagesse naturelle (sophia phusikè) » (V, 8, ch.5, 4), c’est-à-dire à reconnaître une proximité entre sa manière de produire et la façon dont la nature engendre les êtres naturels. Le sujet de la question désigne ce que nous appelons art, c’est-à-dire les Beaux-Arts et la littérature. L’art est aristocratique dit Nietzsche : « L'aristocrate et l'artiste, qui posent des valeurs sans discuter, sont l'expression même des forces actives. J.-C., 347 - 346 av. Dans sa description des « Vieux souliers avec lacets » de Van Gogh, Heidegger montre qu’il n’y a rien de plus révélateur de l'être authentique, de la « vérité » de cette paire de bottines de paysans où se lit toute l'usure et la fatigue du labeur des champs. Dans le Sophiste, il envisage le cas du peintre, ou du sculpteur, qui doit produire un ouvrage de grandes dimensions : « s’ils rendaient la proportion véritable propre à la beauté des choses, tu sais fort bien que les parties supérieures de l’ouvrage apparaîtraient plus petites qu’il ne faut et les parties inférieures, de leur côté, plus grandes, pour la raison que les premières sont vues par nous de loin, tandis que les secondes le sont de près » (235e). C’est beaucoup moins clair dans l’ordre artistique. [33] Martin Heidegger, « De l’origine de l’œuvre d’art », version de 1931-32, Texte allemand et traduction française par Nicolas Rialland, Édition bilingue numérique [pilefacebis.com/sollers/IMG/pdf/heidegger_de_l_origine_de_l_oeuvre_d_art.pdf], [34] Martin Heidegger, « De l’origine de l’œuvre d’art », version de 1931-32, Texte allemand et traduction française par Nicolas Rialland, Édition bilingue numérique [pilefacebis.com/sollers/IMG/pdf/heidegger_de_l_origine_de_l_oeuvre_d_art.pdf]. A l’inverse, la beauté du Taj Mahal, la beauté d’un Cézanne ou de la Septième symphonie de Beethoven, s’imposent intuitivement à nous sans qu’il soit nécessaire de recourir à quelque explication que ce soit. Platon interprète l’art du point de vue du spectateur et de l’Éros sensuel. La, Aristote ne met pas en question la thèse selon laquelle la poésie est essentiellement une, Sur ce point, Aristote rejoint son maître, et loin de confondre la poésie avec la maîtrise des artifices métriques, il range ces derniers dans la catégorie des « assaisonnements (, Loin de dénoncer le caractère mimétique de la poésie, Aristote justifie l’imitation poétique comme quelque chose de naturel à l’homme : car l’homme est « le plus imitateur des animaux (, En outre, on peut rattacher le plaisir de l’imitation au plaisir de la connaissance, car l’image fait connaître. Aristote veut notamment que le chœur concoure à l’action, « comme chez Sophocle » (ch.18, 1456a 27, p.57), et n’y introduise des intermèdes étrangers à l’histoire. on peut cependant introduire de l’imitation dans le récit, ce qui donne la poésie mixte : l’auteur alors se dissimule en faisant parler ses personnages. C’est par suite la forme de poésie qui a l’impact le plus puissant sur les passions des spectateurs : Platon la condamne pour les sujets qu’elle traite, et pour son mode d’action sur l’âme. Platon ajoute : « Egô dé technèn ou kalô, ho an êi alogon pragma » (pour ma part, je n’appelle pas art une œuvre dépourvue de raison). »[12]. Le moralisme esthétique de Platon ébranle en fait l’esthétisme moral des Grecs : les poètes, en faisant admirer leurs héros, ont enseigné à trouver belles des actions qui ne le sont pas. La quête du beau est « instrument de réminiscence », car elle ouvre l'esprit au souvenir de son origine divine et du monde intelligible qui est notre « véritable patrie ». Suivent le texte sur l'art d'imitation (ou mimesis) et son analyse en deux temps : le concept de mimesis et la façon dont Platon l'aborde, puis l'invitation du philosophe à reconsidérer la mimesis, ce que permet la forme du dialogue, qui jamais ne fige la pensée. A la différence de l'artisan et du technicien qui « ne font » qu’amener à l’existence ce qui est déjà inscrit potentiellement dans les choses, l'artiste amène un supplément de sens à sa création. Cette analyse rejoint celle de Gadamer à propos de l’image du modèle lorsqu’il en fait une réalité autonome qui, émanant de ce qui est rendu présent par elle, lui apporte un surcroît d’être. Ils sont l’œuvre des deux plus grands héritiers du platonisme : Aristote (384-322), et Plotin (203-270). « Lépopée et la poésie tragique, comme aussi la comédie, lart du dithyrambe, et, pour la plus grande partie celui de la flûte et de la cythare, ont tous ceci de commun quils sont des représentations. Mais Platon ne trouve pas d’autre critère envisageable que ceux du bien moral. L’œuvre est l’acte de construction d’une nouvelle réalité sensible qui affirme et consacre l’unité créatrice de vérité venant se substituer au chaos de la réalité prosaïque. En cela, l'art est à l'opposé de la philosophie. Cela ne s'explique pas. Les premiers philosophes qu’on appelait « Des physiciens » ne s’occupaient pas de politique, ni de morale individuelle, ils essayaient plutôt de comprendre la nature, en se basant sur les quatre éléments : l’air, le feu, l’eau et la terre qui constituaient, à l’époque, des éléments importants à leur réflexion8. Plotin relève toutefois que la beauté, telle que les Stoïciens la comprennent, ne se limite pas à cette idée de proportion : s’y ajoute la mention des « belles teintes ». Sur ce point, Aristote rejoint son maître, et loin de confondre la poésie avec la maîtrise des artifices métriques, il range ces derniers dans la catégorie des « assaisonnements (hèdusmata) » (ch.6, 1449b 25 ss). « L’art est la belle représentation d’une chose et non la représentation d’une belle chose »[11] dit Kant. C’est par un tel éclat que la bonne conduite peut devenir exemplaire. Platon, Athènes, 428 - 427 av. Le jugement de Platon paraît choquant du fait de ce qu’a été l’art grec, encore objet d’une admiration universelle. Le point culminant pour Platon est la condamnation de Socrate en 399, pour impiété à l’égard du caractère sacré de la Cité et de l’activité politique. Une certaine tradition n’a retenu du platonisme qu’une condamnation des arts et de la poésie. Éros doit s’affranchir du piège de la sensualité pour accéder à l’enfantement. L’art – le vrai – consiste à perfectionner la nature en utilisant les moyens qu’elle donne à des fins qu’elle ne produit pas : c’est ce qu’on fait quand on irrigue des terres incultes, en creusant un réseau hydrographique artificiel. [29] Chez Aristote, principe créateur de l'être, par lequel l'être trouve sa perfection en passant de la puissance à l'acte. Ces différences spécifiques déterminent ce qu’Aristote appelle son être en acte, sa réalité singulière. Pourtant les arts ont eux aussi des résultats. Il s’agit d’une intuition tout à la fois sensible et intellectuelle, puisqu’elle est la saisie d’un intelligible dans une chose sensible singulière. Lorsqu’il pense en vue de produire une connaissance scientifique, l’intellect analyse et démontre, c’est-à-dire distingue des concepts et enchaîne logiquement des propositions : ces opérations sont essentiellement, On peut la comparer au type de production que nous appelons, Cette compréhension de la création artistique conduit Plotin à attribuer à l’artiste une « sagesse naturelle (, On peut comprendre cette « sagesse naturelle » comme la, L’art reçoit ici une fonction que l’on peut appeler, Platon avait dit dans le même sens, au sujet du bien absolu, qu’il est « au delà de l’essence (. Aussi Platon emploie-t-il pour caractériser l'art exactement le même vocabulaire que celui dont il décrit et définit la sophistique. Elle est rejetée comme moralement ruineuse : « du poète imitateur, nous dirons qu’il introduit un mauvais gouvernement dans l’âme de chaque individu, en flattant ce qu’il y a en elle de déraisonnable, ce qui est incapable de distinguer le plus grand du plus petit, qui au contraire regarde les mêmes objets tantôt comme grands, tantôt comme petits, qui ne produit que des fantômes et se trouve à une distance infinie du vrai » (République, X, 605e). Il y a là une manière d’identifier le beau et le bien qui est en fait caractéristique de la moralité grecque, laquelle se résume dans l’expression courante kalos kagathos. A partir du 5ème siècle avant J.C, une autre génération de philosophes est entrée en scène, et eux, abordaient directement la question politique, puisque qu’ils étaient des professeur… Ainsi le bien, pris en lui-même ou sous la forme des diverses vertus, est accessible – difficilement – à l’intelligence. Cela permet de voir en même temps dans la beauté corporelle un bon point de départ, un « échelon (épibathra) » – terme emprunté au Banquet (211b) –, pour rechercher l’essence de la beauté : les corps se présentent de manière immédiatement reconnaissable comme un mixte de multiplicité et d’unité, de variabilité et d’identité. L’épopée doit raconter un grand nombre d’histoires (muthoï), se déroulant sur un très long temps, mais se rattachant à un même centre : par exemple la guerre de Troie. [27] En termes plus modernes, dans ce contexte on préférera le mot « finalisation » au mot « perfection » pris dans son sens aristotélicien. Mais les mains de l’artiste ou de l’artisan nous révèlent qu’il dispose d’un potentiel inverse, de nature néguentropique[24]. Tous les modes musicaux ne seront donc pas admis : on admettra le dorien (mi), violent, et le phrygien (ré), volontaire (hékousion), mais pas les modes plaintifs ou indolents (lydiens et ionien). La tragédie grecque a mis en scène la prise de conscience que les hommes sont des artisans de leur propre malheur, mais d’un malheur disproportionné par rapport à la conscience qu’ils peuvent avoir de leurs actes, et qui pour autant est mis au compte d’une nécessité qui les transcende : Œdipe réalise que ce sont ses propres décisions qui ont fait de lui un parricide et un inceste, et il se crève les yeux pour ne plus voir l’insoutenable, ou peut-être au contraire pour ne plus s’en laisser distraire. On manque alors les vraies questions que soulève Platon à propos de l’art. La deuxième expression utilisée par Plotin oblige à revenir au sens étymologique de la summétria, qui signifie littéralement le fait d’avoir une mesure commune, une commensurabilité, autrement dit une proportion. La condition présupposée est évidemment que le législateur soit philosophe. Opposant « l’art qui poursuit la ressemblance » à celui qui « produit le simulacre »(Sophiste, 236 a-c), Platon distingue deux sortes d’images (le mot utilisé est celui d’eidôlon), celles qui procèdent du souci de vérité, de montrer les choses comme elles sont, et celles qui n’en procèdent pas. [5] Platon, « La République », Livre VII op. Comme chez Aristote, le peintre de Heidegger transcende la réalité brute du modèle pour la transposer dans l'ordre général : ce qu'est vraiment la paire de chaussures dans l'existence paysanne. 2/ Beauté sensible et beauté intelligible. L’analyse aristotélicienne correspond bien à ce type de conception de l’œuvre.
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